Face à l’inflation, le risque de faire une croix sur une alimentation saine


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    « On fait déjà ce qu’on peut pour remplir l’assiette, avant de voir si elle est equilibrante » : face à l’inflation qui pèse surtout sur les plus petites bourses, certains Français peinent à conserver une alimentation saine, entre légumes inabordables et retour de la malbouffe.

    Au-dessus de son char « deux fois moins rempli qu’avant« , Catherine Garnier, 39 ans, soupire : « J’ai pris moins de légumes et de viande, plus de pâtes et patates« . Exit aussi les quelques produits bio qu’elle se permettit parfois.

    Une nouveauté cependant dans son panier : un paquet de pizzas surgelées, « alors qu’avant on les faisait maison« , cette explique mère de 3 enfants en région parisienne, « mais maintenant les ingrédients sont trop chers, c’est plus intéressant de les acheter toutes faites« .

    « C’est pas demandé le top pour l’alimentation, mais on fait déjà ce qu’on peut pour remplir l’assiette », soupire cette employée de mairie qui prévenante pourtant « avoir un salaire décent« .

    L’inflation, en particulier celle sur les produits alimentaires (+12 % sur un an en octobre, selon l’Insee), risque de dégrader la qualité de l’alimentation des Français.

    Précarité

    Nicole Darmon, directrice de recherche à l’INRAE ​​(Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement), s’inquiète surtout d’une baisse de consommation des fruits et légumes, essentiels pour une alimentation équilibrante mais qui « deviennent tous chers » (+33,9% en octobre sur un pour les légumes frais).

    L’experte en nutrition explique que cette catégorie d’aliments constitue depuis longtemps le véritable marqueur « du statut socio-économique » des consommateurs – celle qui passe le plus souvent à la trappe chez les moins aisés-, « et pas la viande comme on pourrait penser« . Mais que cela risque de « accordéonado » avec l’inflation.

    « Quand on est soumis à de fortes contraintes budgétaires, on va pluto s’orienter vers des sources de calories pas chères comme les féculents raffinés – pâtes, riz, pain blanc- et les produits gras et sucrés », affirme-t-elle à l ‘AFP, au risque de ne pas apporter tous les « nutriments protecteurs » – fibres, vitamines, minéraux d’acides gras essentiels- dont le corps a besoin.

    « On sait que la malbouffe est clairement un marqueur de la précarité, même avant les crises sanitaire et économique, mais l’inflation vient aggraver ce problème», alerte également Karine Jacquemart, directrice de l’association Foodwatch France.

    Les Français précaires consommation déjà »beaucoup trop d’aliments ultra-transformés, qui contiennent souvent moins d’éléments nutritifs et de fibres, mais beaucoup trop de sucres cachés« , ajoute-t-elle.

    Le directeur de Foodwatch France, qui appelle à plus de transparence des prix et des compositions, met par ailleurs en garde : « Avec l’envolée des prix de certains ingrédients, le risque c’est que les industriels soient tentés de les remplacer encore plus qu’avant par des substituts moins chers« .

    NON aux régimes, OUI à WW!

    « Cheapflation »

    remplacement « certains produits de base par des substituts moins chers« , c’est ce qu’on nomme la « cheapflation », contraction de « cheap » (« bas de gamme ») et « inflation », explique à l’AFP John Plassard, expert en macroéconomie chez Mirabaud.

    Cela consistait par exemple à mettre le moins de crème – « l’ingrédient le plus cher » – dans une glace, remplacer du chocolat par des arômes chocolatés ou encore réduire le taux de fromage dans le parmesan, « en rajoutant des substituts de bois, qui sont totalement autorisés mais n’ont absolument aucun goût« , détaille M. Plassard.

    Cette pratique assez nouvelle, venue des Etats-Unis, touche aussi l’Europe et « risque de s’intensifier à cause de l’inflation« , affirme-t-il, car « c’est quelque chose qui permet aux grandes marques de conserver leurs marges ».

    Maïs « le risque numéro un » pour le consommateur, « c’est la dégradation de son alimentation« , face à des produits « clairement moins digestes et souvent beaucoup plus gras », met-il en garde. « L’inflation, ce n’est que un chiffre, ça a des conséquences sur les salaires mais aussi sur la qualité de la nourriture. »

    A terme, l’inflation risque aussi de renforcer les « inégalités sociales de santé liées à l’alimentation« , selon Nicole Darmon, exposant les plus démunis à « une moins bonne protection contre les maladies cardiovasculaires et les cancers« .

    Verser »rééquilibrer l’alimentation sans déstabiliser le budget« , l’experte en nutrition conseille de « baisser les quantités de viande pour pouvoir introduire plus de fruits et légumes » ou d’utiliser des « produits intermédiaires intéressants« , comme les produits laitiers ou les œufs. Et appelle de ses vœux une solution à l’échelle de l’État, comme la création d’une  » Sécurité sociale de l’alimentation ».



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